Leak-tique: Tyler, The Creator - Goblin

Leak-tique: Tyler, The Creator - Goblin

Malgré les tentatives de Tyler, qui aurait lui-même uploadé des fausses versions de Goblin, le premier album officiel de Odd Future Wolf Gang Kill Them All (OFWGKTA) a leaké partout.

C'est un des albums les plus hypé depuis que Tyler et Hodge Beat ont tout défoncé à Jimmy Fallon, et que le groupe a fait des performances énergiques à SXSW, Coachella et un peu partout en Amérique (sauf à Montréal, duh).

Pis, ça donnes-tu?

C'est à toute fin pratique la continuation de la direction que Tyler avait pris avec Bastard: BPM lents, basses distortionnées, claviers lugubres, soupoudrés de lignes vantant Satan, les écoles qui brûlent et les relations sexuelles violentes.

L'album est une discussion entre Tyler le petit gars de famille dysfonctionnelle insécure à propos de son physique et qui fait de l'asthme, et «Goblin», le violent, über-confiant et insatiable. Ce jeu d'identité est fort pratique pour aborder la thématique de la transition, un thème dominant de l'album: la négociation entre l'anonymat et la célébrité, l'adolescence et la vie adulte, l'insouciance et les responsabilités.

Cette dualité de personnalités est particulièrement forte dans la pièce Goblin, qui ouvre l'album, où «la grosse voix», commente, questionne et contredit Tyler. Cette voix incarne autant sa conscience, son psychologue et, on comprend assez vite, son «Goblin». Impossible à semer, elle va le suivre pendant toute l'heure et quart du disque.

La volonté de choquer transpire de toute la démarche. Tous les tabous (américains) y passent: sexe, religion, violence, suicide, pédophilie. Et Tyler écorche pas mal de monde, de Buffy, au blogue 2 Dope Boys, à Michael Jackson, Taylor Swift et Bruno Mars. Personnellement, je ne trouve pas que ce sont les moments où Tyler et sa bande brillent le plus.

C'est dans le doute et les hésitations typiques de l'adolescence que Odd Future se démarque. L'ouverture presque obscène de Tyler sur les détails douloureux de son enfance est toujours aussi efficace. L'ambiguïté entre le sexe comme besoin/valorisation et les relations significatives avec les filles est central, pour peu qu'on puisse passer outre les bitch, dick, pussy, fuck. Le Tyler qui doute de la longévité de son succès et de son talent, contrasté avec les excès de confiance dont il capable, montre une vulnérabilité qui n'est pas sans rappeler Kanye West sur My Beautiful Dark Twisted Fantaisy.

Ceci étant dit, le Creator aurait dû s'inspirer un peu plus de Yeezy pour la production. Poliment, on dirait que Goblin est homogène. Ou carrément redondant, pour être complètement honnête. Sandwiches, Yonkers et Tron Cat se démarquent d'un lot de beats reposant sur les mêmes ressorts et sonorités, qui perdent rapidement de leur efficacité. Bitch Suck Dick, inspirée de l'univers sonore de Waka Flocka, et She, avec Frank Ocean, sont les seuls moments où on réussit à prendre un peu d'air.

Quant aux collaborations... On ne découvre pas de perles cachées. Les membres de OFWGKTA, à part Hodgy Beats et Frank Ocean, demeurent unidimensionnels et, pour l'instant, relativement inintéressants.

Avec des attentes aussi élevées, il aurait été impossible que Tyler satisfasse complètement. Goblin ne convaincra sûrement pas les sceptiques. Les fans pourront se payer une bonne virée dans l'univers tordu et, avouons-le, passionnant de Odd Future. Mais ce n'est pas l'album qui va leur permettre de transcender les frontières de la culture populaire.

Pour pré-écouter l'album avant de l'acheter:

TYLER, THE CREATOR - GOBLIN

Psssttt ! Envoie-ça à ton ami!

PLUS DE NOUVELLES